Rébellion de Wagner: avant la rupture, l’escalade des tensions entre le Kremlin et Prigojine – Base Cote Media

Rébellion de Wagner: avant la rupture, l’escalade des tensions entre le Kremlin et Prigojine

Avant la rébellion du chef de Wagner et l’accusation de « trahison » prononcée par Vladimir Poutine, l’escalade a été progressive entre Evguéni Prigojine et le commandement de l’armée russe. Si des critiques avaient déjà été émises par Prigojine contre l’état-major quelques mois après le début de la guerre, l’escalade s’est accélérée ces dernières semaines. Début mai 2023, le chef de la milice était entré dans une colère noire sur Telegram en dénonçant le manque de munitions auquel faisaient face ses troupes en pointant directement du doigt les responsabilité du ministre de la Défense Sergueï Choïgou et du chef d’état-major russe Valéri Guerrassimov. « Il nous manque 70% des munitions que nous avons demandées. Choïgou, Guerrassimov, où sont ces putains de munitions ? », hurlait alors face caméra Evguéni Prigojine qui avait fini par obtenir la promesse de Moscou d’être rapidement livré en armes pour prendre définitivement Bakhmout.

À peine quelques jours plus tard, le 9 mai juste après le discours de Vladimir Poutine lors des commémorations de la victoire de la Russie sur l’Allemagne nazie, Prigojine mène une nouvelle charge sur Telegram contre le Kremlin accusant le pouvoir russe de ne rien faire pour empêcher les frappes ukrainiennes sur la région de Belgorod. « Pourquoi l’État n’est-il pas capable de protéger le pays », questionnait-il alors. Très cru, il va jusqu’à évoquer « l’échec de l’invasion russe ».

Attaques contre Poutine

Si Evguéni Prigojine avait voulu gâcher la fête des commémorations du 9 mai, il ne s’y serait certainement pas pris autrement. Car si ses critiques contre les chefs de l’armée étaient alors devenues de plus en plus fréquentes, il évitait jusque-là de s’en prendre directement à Vladimir Poutine. Jusqu’à cette date du 9 mai, où, dans une deuxième vidéo publiée sur Telegram, le chef de Wagner semble se moquer du maître du Kremlin, tout en prenant toutefois soin d’entretenir un certain flou autour de l’identité de la personne que ses propos visent. « Au lieu de tuer l’ennemi, l’état-major laisse mourir nos camarades et le grand-père bienheureux pense que c’est bon pour lui ? S’il s’avère que c’est le cas que Dieu nous bénisse, mais comment allons-nous gagner cette guerre et qu’adviendra-t-il de la Russie s’il s’avère, et je ne fais que le supposer, que ce papy est un couillon fini ? », lance Prigojine toujours face caméra.

À mesure que Evguéni Prigojine use de plus en plus d’une liberté de ton qui vaudrait à n’importe quel citoyen russe un séjour en prison, les tensions entre Wagner et l’état-major russe montent encore d’un cran. Début juin, le chef de Wagner parle d’un incident armé. Il affirme que ses hommes ont été attaqués par des soldats russes. Il diffuse alors la vidéo d’un officier de l’armée régulière capturé par sa milice et qui semble reconnaitre les tirs sur les troupes de Wagner.

« Wagner ne signera aucun contrat avec Choïgou »

Parallèlement, Prigojine dénonce aussi les bilans fournis par Moscou qu’il qualifie « d’élucubrations » lorsque les autorités russes clament avoir tué 1 500 soldats ukrainiens en quelques jours. Mais, le point de non-retour est certainement atteint le 10 juin dernier lorsqu’un décret du ministre de la Défense Sergueï Choïgou ordonne à tous les combattants volontaires de Wagner de régulariser leur situation en signant un contrat avec l’armée. Il donne à ces hommes jusqu’au 1ᵉʳ juillet fin du mois pour le faire. L’objectif affiché est de renforcer l’efficacité de l’armée régulière alors que la contre-offensive ukrainienne a débuté. La réponse de Evguéni Prigojine ne se fera cependant pas attendre : « Wagner ne signera aucun contrat avec Choïgou », assure-t-il.

Dans sa réponse au ministère, Evgueni Prigojine affirme que Wagner est totalement dévoué aux intérêts de la Russie, mais que le ministre de la Défense – qu’il ne cesse d’insulter sur les réseaux sociaux – n’est selon lui pas capable de diriger correctement des formations militaires. Ce vendredi, le chef de Wagner a finalement accusé ce même ministère de la Défense d’avoir mené des frappes meurtrières contre des camps de ses miliciens avant d’envoyer ses hommes sur Rostov-sur-le-Don prendre le contrôle du quartier général du commandement sud de l’armée russe et de débuter une guerre ouverte entre Wagner et l’armée régulière.

rfi